Harcèlement scolaire : ce phénomène inquiétant

Le fléau du harcèlement scolaire explose ces derniers temps. Des enfants décident de mettre fin à leurs jours à cause des mauvais traitements qu’ils endurent à l’école. Les experts s’accordent à dire que ce phénomène dépasse largement le cadre scolaire, même si l’école en est souvent le théâtre principal. Les répercussions néfastes de cette réalité inquiétante exigent une prise de conscience collective de la part de toute la communauté éducative. Décryptage !

La réalité du harcèlement scolaire

Le harcèlement en milieu scolaire est une réalité troublante qui découle souvent des différences constatées chez les élèves. Elles peuvent être physiques, sociales ou émotionnelles et sont utilisées comme prétextes pour intimider, exclure ou maltraiter d’autres élèves. Cette réalité met en lumière les défis auxquels sont confrontés les enfants qui subissent des brimades quotidiennes.

Les problématiques liées aux comportements atypiques des adolescents favorisent ce phénomène. A cette période de leur vie, certains ados semblent constamment perdus dans leurs pensées. Ils ont tendance à s’isoler et à dissimuler leurs souffrances émotionnelles. Ils se sentent pris entre deux mondes, l’un étant leur vie quotidienne et l’autre, un univers sombre qui les hante.

Les nouvelles technologies et les réseaux sociaux ont tendance à promouvoir une forme de cyberharcèlement et l’envoi de commentaires cruels et méprisants de la part de leurs camarades à l’encontre des adolescents harcelés. Ils se sentent surveillés et jugés tout le temps. Ce qui les fait douter de leur propre valeur. Cela engendre évidemment un sentiment d’impuissance et d’isolement chez les victimes.

Au milieu de cette détresse, ces adolescents sont pris au piège entre le fait de vouloir détester leurs harceleurs et celui de vouloir être acceptés par eux. Ils sont incapables de se détacher de cette relation toxique et finissent par se retourner contre eux-mêmes. Ils trouvent  plus facile alors de se détester que de faire face à la cruauté des autres.

Cette indifférence à l’égard de ces élèves les pousse à vouloir s’éloigner définitivement de tous ces bouleversements. Ces situations soulèvent des défis pour les enseignants qui tentent de les comprendre. D’ailleurs, la communication limitée entre les parents et l’école entrave la recherche de solutions à ces problèmes.

Quels sont les facteurs qui influencent le harcèlement scolaire ?

Le harcèlement scolaire ne concerne pas seulement les enfants victimes, mais aussi ceux qui en sont les auteurs. Les statistiques révèlent qu’un jeune sur dix est victime de mauvais traitements à l’école, mais en réalité, de nombreux élèves y sont impliqués. Malheureusement, les parents évitent souvent d’aborder ce sujet, le considérant comme tabou. De leur côté, les professionnels de l’éducation le considèrent comme délicat.

Selon les propos du philosophe Jean-Pierre Bellon, les harceleurs ne sont pas des enfants atypiques. Ce sont plutôt des élèves ordinaires, indistincts des autres. Ils se trouvent entraînés dans une dynamique de groupe. Ils opèrent dans des espaces moins surveillés par les adultes tels que la récréation, les couloirs ou encore les plateformes des réseaux sociaux.

La pédopsychiatre Nicole Catheline préfère mettre en évidence les circonstances et les conditions qui peuvent rendre un enfant plus vulnérable au harcèlement. Parmi ces situations figurent, entre autres, la perte d’un animal de compagnie, un décès familial ou des difficultés financières vécues par les parents.

L’âge constitue également un facteur important. Selon cette pédopsychiatre, le harcèlement peut commencer dès la maternelle. Il atteint son point culminant à la fin de l’école primaire et au début du collège. Le phénomène se calme généralement au lycée. En effet, les élèves plus âgés et matures ressentent moins le besoin de s’associer à un groupe et de rejeter ceux qui sont différents.

Nora Fraisse, la fondatrice de l’association Marion la main tendue, souligne qu’il n’existe pas de profil type défini pour les harceleurs. Ils peuvent provenir de toutes les catégories socioprofessionnelles. Parfois, ce sont les anciennes victimes qui rejoignent le groupe de harceleurs par crainte d’être exclues. Ils perpétuent ainsi des actes violents qu’ils ont eux-mêmes endurés.

Des initiatives déterminantes pour lutter contre le harcèlement scolaire

Nora Fraisse souhaite mettre en place des groupes de parole pour les parents des agresseurs. Elle est sollicitée par les tribunaux d’Évry ou de Meaux pour créer des ateliers assurant la prise en charge de ces enfants. Elle estime qu’il est temps de s’adresser également aux auteurs des actes de harcèlement, tout comme pour le cas des violences conjugales.

En outre, le programme pHARe, expérimenté en 2019, est actuellement en cours de déploiement. Son objectif est d’apporter un soutien à tous les élèves, y compris les harceleurs. Le philosophe Jean-Pierre Bellon est impliqué dans ce programme. Il explique que celui-ci consiste à sensibiliser les harceleurs concernant la situation de leurs camarades victimes de brimades.

Le but étant de favoriser le développement de l’empathie envers eux, sans recourir à des accusations ou à des sanctions immédiates. Il soutient le fait que la punition seule ne suffit pas souvent à mettre un terme au harcèlement, mais peut même renforcer le phénomène. Les professionnels de l’éducation préfèrent ainsi utiliser le terme intimidateur plutôt que harceleur.

Jean-Pierre Bellon a également influencé le développement de la méthode de la préoccupation partagée. Celle-ci est actuellement mise en œuvre pour faire face à ces drames dans les établissements scolaires. Selon une étude menée en 2022 dans huit académies, cette méthode permettrait de résoudre 83% des cas de harcèlement scolaire.

Il est important de noter que la loi de mars 2022 a qualifié le harcèlement scolaire comme un délit. En conséquence, les mineurs de plus de 13 ans peuvent encourir des peines allant jusqu’à cinq ans d’emprisonnement en cas de suicide de la victime. Cependant, Valérie Piau, avocate spécialisée en droit de l’éducation, constate que les condamnations sont encore rares. Les harceleurs n’écopent, bien souvent et malheureusement, qu’à un rappel à la loi.

Une prise de responsabilité accrue du gouvernement et une implication renforcée des acteurs concernés

Suite au récent suicide tragique de la jeune Lindsay, une collégienne victime de harcèlement scolaire, une réelle prise de conscience de ce sujet s’est opérée. Le gouvernement considère désormais le harcèlement scolaire comme une priorité absolue. Le ministre de l’Éducation nationale, Pap Ndiaye, a annoncé la mise en place d’une grande campagne de prévention à la rentrée.

Parallèlement, Élisabeth Borne, la Première ministre, exprime sa volonté de mettre en place une réponse interministérielle pour lutter contre ce fléau. Elle souhaite en même temps responsabiliser les parents et se montre déterminée à agir à tous les niveaux pour faire face à ce problème.

Des initiatives ponctuelles de sensibilisation urgentes ont été constatées dans la semaine du 12 juin 2023. Des écoliers à Saint-Laurent-du-Var ont été récompensés pour avoir réalisé une vidéo sur le thème du harcèlement scolaire. Ces élèves ont été honorés pour leur travail, qui mettent en évidence leur engagement et leur contribution à la sensibilisation contre le harcèlement scolaire.

Ce prix intitulé « Non au harcèlement » a été décerné par l’académie de Nice. Faïza Mathy, leur professeure des écoles, explique qu’il est préférable de mettre l’accent sur la sensibilisation des enfants dès leur plus jeune âge. Elle est d’avis que lorsque les élèves atteignent le collège ou le lycée, il est déjà trop tard pour intervenir efficacement.

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