La souffrance des magistrats : la santé mentale des juges inquiète

Lancés en fin 2021, les Etats généraux de la justice dressent un constat alarmant du fonctionnement du troisième pouvoir. D’un côté, on note un manque de moyens et des délais étendus, qui affectent à la fois les avocats et les justiciables. De l’autre, les magistrats sont à la peine lorsqu’il s’agit de leur santé mentale. Loin de l’image du juge « froid et inflexible », ce constat doit avant tout nous rappeler que les juges sont avant tout des êtres humains…

« Une institution qui ne fonctionne pas »

Chroniqueur judiciaire de longue date sur France 2, Dominique Verdeilhan n’y va pas par quatre chemins : « On peut voir une similitude aujourd’hui entre les robes noires des magistrats et les blouses blanches de l’hôpital, c’est le même constat d’une institution qui ne fonctionne pas ». Si le journaliste est témoin de la succession de nombreux gardes des Sceaux, il constate peu de résultats en fin de compte : « Chacun y est allé de sa réforme, soit en réaction à un fait divers, soit pour améliorer la justice. Eric Dupont-Moretti s’est battu, comme Nicole Belloubet avant lui, pour le budget de la justice ».

Un mal vécu de la part des magistrats

« Quelque chose est revenue de façon constante dans toutes mes rencontres, un mal vécu de leur part, c’est la solitude. C’est-à-dire que le juge prend la décision tout seul de vous mettre en examen, de vous mettre en prison, de vous retirer l’enfant pour le placer dans un foyer. C’est un peu moins du procureur, parce qu’il travaille en équipe ». C’est ce qu’explique Dominique Verdeilhan dans son livre Les Magistrats sur le divan (2017), qu’il a écrit au bout de rencontres avec plus de 80 magistrats.

Seuls face à leurs décisions, les juges qu’on affuble hâtivement de froideur et d’inflexibilité sont en vérité isolés. Et face à l’isolement ou à la solitude, ils agissent comme tout être humain le fait, qu’ils s’appellent Pierre Michel, Charlotte G ou Philippe Sauvannet, ils n’en restent pas moins des êtres humains. A ce propos, l’auteur-journaliste insiste sur le besoin pour les juges de s’épancher : « Avec qui parler de la décision que je dois prendre ? Avec qui parler de ce que j’ai vu aujourd’hui ? ». Pour illustrer son propos, il donne en exemple une juge aux affaires familiales qui a été témoin du meurtre d’une femme par son mari. « Je prends tes dossiers et je continue ton travail », s’est contenté d’avancer son supérieur hiérarchique, sans jamais prendre la peine de voir comment elle a vécu cette expérience traumatisante.

« Il y a des magistrats qui se suicident »

S’il ne fallait qu’un rappel de la condition humaine des juges, l’affaire du meurtre du petit Grégory l’incarne parfaitement. Au cours des années 1980, la France était émue par le meurtre de Grégory, une enquête menée par le juge instructeur Lambert. Sans doute à cause de l’emballement médiatique, le coupable n’a pu être identifié. Ainsi, lorsque le juge a inculpé Christine Villemin et l’a incarcérée, il a commencé à pleurer. En 2017, le juge Lambert s’est donné la mort…

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