Tour de France : les coureurs sont-ils humains ? Doit-on encore penser au dopage ?
Cette année 2023, le Tour de France en est à sa 110è édition. Lancé le 1er juillet dernier, il est prévu se finir, comme chaque année, sur les Champs-Elysées le 23 juillet prochain. À quelques jours de l’arrivée, les commentaires vont bon train. Il faut dire que le duo de tête du classement fait tomber des records et relègue à plus de cinq minutes le troisième cycliste. Est-ce encore du dopage ? Quelques éléments de réponse dans cet article.
Des chiffres qui affolent les compteurs
Les deux premiers coureurs du classement au Tour de France 2023 sont le Danois Jonas Vingegaard (Jumbo-Visma), vainqueur sortant, et le Slovène Tadej Pogacar (UAE Team Emirates), double vainqueur de la Grande Boucle. Le mardi 18 juillet 2023, le premier nommé disposait d’une avance de 10 secondes sur le second cité.
Les deux cyclistes s’affrontent sur la route à coup de performances impressionnantes. C’est Jonas Vingegaard qui a lancé les hostilités le mercredi 3 juillet dernier. À l’attaque dans le final du col de Marie Blanque, le Slovène a signé un temps d’ascension de 20 minutes 57 secondes. Il bat d’une minute et trente secondes le précédent record que son adversaire, Tadej Pogacar, a établi en 2020.
Vendredi dernier, le jour de la fête Nationale, c’est au tour de Tadej Pogacar de s’illustrer dans l’ascension du Grand Colombier. Il a effacé son propre record de montée de 45 minutes et 50 secondes, également détenu depuis 2020, en l’améliorant avec deux minutes en moins cette année 2023.
Le lendemain, les deux protagonistes étaient bien partis pour battre le record de Marco Pantani qui datait de 1997 dans le Col de Joux-Plane. Toutefois, un concours de circonstance en a décidé autrement. Gênés par deux motos, ils ont dû faire du surplace et terminent une minute de plus que le chrono de Marco Pantani. Pourtant, avant cet épisode malheureux, les deux étaient en avance dans les temps du record.
Dimanche, les deux coureurs se sont attaqués au record de rapidité de Christopher Froome, quadruple vainqueur de la Grande Boucle, dans la montée vers Saint-Gervais. Ils n’ont mis que 18 minutes et 27 secondes, soit 42 secondes de plus que les temps établis par le Britannique.
Est-ce de la force surhumaine ou du dopage ?
Les observateurs sont partagés entre admiration et suspicion. Il est de notoriété publique que le monde cycliste, et le Tour de France en particulier, est empreint de dopage. Lance Armstrong, septuple vainqueur de la Grande Boucle, en est le parfait exemple. En 2013, il a reconnu s’être dopé durant ses courses. Il a ensuite été déchu de toutes ses victoires et suspendu à vie du cyclisme international.
Plus récemment, c’est le quadruple vainqueur de la course, Christopher Froome qui a fait la une des journaux sur le sujet. Vainqueur de la 100è édition de la Grande Boucle en 2013, suivie d’un triplé de suite respectivement en 2015, 2016 et 2017, le Britannique a vu une procédure antidopage ouverte à son encontre vers la fin de l’année 2017.
En effet, en 2017, un contrôle antidopage effectué lors du Tour d’Espagne qu’il a d’ailleurs remporté, a révélé un taux anormal de salbutamol, une substance utilisée contre l’asthme. Suite à ces résultats, il a failli être écarté de la Tour de France en 2018. Blanchi quelques jours avant le départ, il a finalement été autorisé à participer et a terminé à la troisième place. Ceci étant, les suspicions sur son dopage persistent jusqu’à présent.
Toujours est-il que les performances signées ces derniers jours par Jonas Vingegaard et Tadej Pogacar sont dans le même registre. En effet, les records établis par ces coureurs récemment sont bien meilleurs que ceux des cyclistes accusés ou reconnus de dopage par le passé. Cela ne fait donc qu’alimenter la polémique.
Du côté des concernés, en tout cas, ils rejettent l’accusation de dopage. Jonas Vingegaard et Tadej Pogacar reconnaissent courir plus vite que les autres. Ils affirment comprendre les doutes sur leurs performances. Néanmoins, ils sont fermes et catégoriques quant à leurs situations : ils ne prennent rien de prohibé.
Les explications sont ailleurs
Les temps changent, la préparation à la compétition aussi. Les cyclistes sont de mieux en mieux préparés à présent. Ils sont mieux encadrés, tant sur le plan physique que mental. Pour ce qui est de leur nourriture, les connaissances sur la diététique ont évolué ces dernières années, influençant le régime alimentaire des sportifs tels que les coureurs cyclistes.
Par ailleurs, les vélos ne sont pas en reste. Désormais, ce sont de véritables matériels de haute performance qui sont à disposition des professionnels. Les roues vont très vite et les vélos avec. Dans cette optique, le cycliste Français Hugo Hofstetter a affirmé, en 2022, que les braquets sont augmentés d’année en année. Ce qui peut expliquer l’exposition des records observée ces derniers temps.
Outre ces détails, la manière de courir a bien changé. Les tactiques employées par les équipes en sont le parfait exemple. Leur niveau global a augmenté et ils ont à la fois des champions de haute voltige et des coureurs cyclistes qui servent à attaquer très rapidement.
Un autre cycliste Français, Pierre Rolland (B & B hôtels), précise qu’il n’y a plus d’étape de transition ni de temps mort à présent. Aucune étape n’est plus laissée aux baroudeurs. À la moindre opportunité, les gros rouleurs tentent de piéger les sprinteurs. Cela a pour conséquence de monter le curseur de la course.
De plus, le directeur de Tour de France et ancien coureur cycliste, Christian Prudhomme, confirme ces révélations. Il sent que les étapes de transition disparaissent peu à peu. Les attaques arrivent très tôt et dès la première heure, il y a une course de très grande vitesse avec des favoris et des coéquipiers des favoris dans les échappées. C’est une nouvelle manière de courir, conclut-il.
Enfin, les conditions météorologiques sont également citées comme facteur favorisant ces performances énormes. Le Français Aurélien Paret-Peintre (AG2R Citroën) juge la météo optimale cette année 2023. En effet, s’il est vrai que la période caniculaire épuise les coureurs, il se trouve qu’il y a énormément de vent qui souffle dans le dos des cyclistes accélérant leurs performances.
Reste à savoir si ces explications vont arrêter les suspicions de dopage qui pèsent sur la Grande Boucle. Néanmoins, un petit coup d’œil sur le classement permet de constater que pour le moment, il y a deux coureurs et les autres. Cela pose énormément de questions et le risque de polémique ne fait que se renforcer dans ce sens.